Mélodie de lecture
L'atmosphère de cet habitacle n'a pas changé. Je l'ai quitté il y a de cela 7500 ans dans l'espoir qu'à mon réveil, nous atteignons enfin notre destination. Ce voyage est sensé être l'espoir de notre espèce toute entière vers une contrée lointaine mais viable.
Il y a de cela des millénaires de trajet, seule aux commandes de cette arche, j'y passais un an à vérifier chaque procédure, chaque correction d'itinéraire potentielle, chaque anomalie qui pouvait se déclarer, et mon devoir fut pleinement accompli. Je m'endormis alors comme tous les autres à bord, pour un voyage qui était sensé durer à peu près 8 millénaires.
Pourtant, me voici après 7500 années, à enregistrer ce qui sera sans doute la seule trace de mon existence à bord de ce vaisseau. Mon réveil inoppiné a eu lieu en raison d'une collision avec un astéroïde à proximité d'un anneau d'une planète quelconque. Comment aurais-je pu prévoir un tel incident ? Je le sais, ces mots feront partis des derniers, même si je survis encore quelques années. Mon corps quant à lui, affaiblis par le voyage, aura disparu dans 5 siècles, quand les premiers colons se réveilleront enfin.
La solitude me pèse. Ce réveil soudain ne me laisse qu'un goût éphémère de ce sommeil millénaire. Mon esprit, quant à lui, semble n'être qu'au lendemain de cette toute première année de solitude, jadis nécessaire. La lumière terne des quelques lointaines étoiles et de l'interface du tableau de bord se font timides face à l'immensité de noir, d'obscurité qu'est ce néant qui domine le cosmos à perte de vue.
Je ne souhaite pas survivre seule ainsi, mon rêve, comme celui de tous ceux qui dorment profondément ici-même, s'est dissipé dès mon réveil. Seule, consciente du temps qui nous sépare de la phase finale, je disparaîtrai en une fraction de seconde dans l'espoir que le prochain éveil soit le dernier.
7500 ans, 3 mois et 4 jours.